L’injonction de payer : une procédure efficace ?
L’injonction de payer : une procédure dont l’efficacité a des limites en vue de recouvrer une créance impayée
Le recouvrement d’une créance peut être envisagé par diverses procédures.
La procédure d’injonction de payer est une procédure qui permet d’obtenir un titre exécutoire très rapidement et à moindres frais, sauf cas d’opposition du défendeur.
En effet, La procédure d’injonction de payer ne présente un intérêt incontestable en termes de gain de temps que dans le cas où le débiteur ne s’oppose pas à l’ordonnance portant injonction de payer.
Si le débiteur forme opposition, le tribunal ayant rendu l’ordonnance convoquera les parties à une audience afin qu’il soit statué sur la demande du créancier au regard des contestations développées par le débiteur (CPC, art. 1418). D’une procédure rapide, on passe alors à une procédure classique au fond avec des délais qui peuvent être longs.
Par ailleurs, étant donné la brièveté de certains délais de prescription (par exemple, deux ans à compter du premier incident non régularisé en matière de prêts à la consommation, C. consom., art. R. 312-35), et le délai n’étant pas interrompu par la délivrance de l’ordonnance d’injonction de payer mais seulement par la signification de celle-ci, il conviendra dans le cas où le délai est proche de l’expiration de suivre une procédure de droit commun en parallèle.
En définitive, si la créance n’est pas sérieusement contestable, il sera préférable d’envisager la procédure du référé-provision, le référé étant une procédure qui permet d’obtenir une décision exécutoire dans des délais très courts.
Ceci étant précisé, vous pourrez trouver ci-dessous les principales règles encadrant la procédure d’injonction de payer.
1.Dans quels cas peut-on utiliser l’injonction de payer ?
L’injonction de payer est ouverte :
- Soit dès lors que deux conditions cumulatives sont réunies :
- la créance, de nature civile ou commerciale, a une cause contractuelle ou résulte d’un caractère statutaire ;
- le montant de la créance est déterminé ;
- Soit lorsque l’engagement résulte de l’acceptation ou du tirage d’une lettre de change, de la souscription d’un billet à ordre, de l’endossement ou de l’aval de l’un ou l’autre de ces titres ou de l’acceptation de la cession de créances.
La procédure d’injonction de payer est ouverte également dans d’autres cas expressément prévus par le législateur :
- le recouvrement des charges de copropriété ( n° 67-223, 17 mars 1967, art. 60: JO 22 mars 1967) ;
- le recouvrement des cotisations prévues par l’organisation interprofessionnelle laitière ( rur. pêche marit., art. D. 632-10);
- le recouvrement de l’acompte devant être versé par les débits de boissons aux producteurs au moment de la commande ( rur. pêche marit., art. L. 665-3);
- le recouvrement des allocations de chômage au profit de l’organisme ayant versé à tort des allocations ( trav., art. R. 1235-1 à R. 1235-17);
- le paiement des prestations de transport du transporteur routier ( com., art. L. 132-8);
- la victime d’une infraction pénale peut demander, selon la procédure d’injonction de payer, le recouvrement des dommages et intérêts que l’auteur s’est engagé à verser dans le cadre de la médiation pénale ou de la composition pénale ; il lui suffit pour cela de soumettre au juge civil le procès-verbal d’accord de médiation ou l’ordonnance de validation (CPP, art. 41-1 et 41-2).
Attention : Sont exclus du périmètre de l’injonction de payer :
- le recouvrement des chèques impayés (régi par une procédure spéciale prévue à l’article L. 131-73 du Code monétaire et financier ) ;
- les créances qui ont pour fondement un délit, un quasi-contrat (enrichissement sans cause, action en répétition de l’indu) ou une disposition légale.
2. Quel tribunal saisir ?
Le tribunal d’instance est compétent pour les créances civiles dont le montant est inférieur ou égal à 4 000 euros, sans atteindre les 10 000 euros, créances pour lesquelles le tribunal de grande instance devient alors compétent pour les matières ne relevant pas de sa compétence exclusive (CPC, art. 1406 . – COJ, art. L. 221-4).
Dès lors que le défendeur n’est plus considéré comme un consommateur agissant hors de son cadre professionnel et qu’il a accepté une lettre de change, c’est le tribunal de commerce qui est compétent.
Le tribunal de commerce connaît en dernier ressort des demandes jusqu’à 4 000 € (C. com., art. R. 721-6 ).
3. Comment obtenir une ordonnance portant injonction de payer
a) Dépôt d’une requête
Remise ou envoi au greffe du tribunal d’instance, du tribunal de commerce ou du tribunal de grande instance de la requête et des pièces.
b) Ordonnance rendue par le juge
Le juge rend une ordonnance :
- S’il s’agit d’une ordonnance de rejet, il n’y a aucun recours possible (pas même le pourvoi en cassation) sauf si exceptionnellement, par exemple, l’ordonnance vise le fait qu’une pièce manque et qu’il est possible au créancier de la verser, auquel cas, il pourra alors très probablement représenter sa requête. De façon générale, cependant, seules restent ouvertes les voies de droit commun.
- S’il s’agit d’une ordonnance portant injonction de payer, le juge enjoint le débiteur de régler tout ou partie des sommes réclamées.
(Si l’ordonnance n’autorise l’injonction de payer que sur une partie de la somme demandée, le créancier dispose d’une option : accepter l’ordonnance telle que sans autre recours ou renoncer à son bénéfice et poursuivre les voies de droit commun)
c) Signification de l’ordonnance au débiteur
L’ordonnance portant injonction de payer doit être signifiée au débiteur dans les six mois de sa date à peine de caducité (CPC, art. 1411).
Le débiteur peut former opposition à l’encontre de l’ordonnance portant injonction de payer.
- si la signification est faite à personne, le délai d’opposition est d’un mois à compter de la signification à personne,
- si la signification n’est pas faite à personne, le délai d’opposition d’un mois court à compter du premier acte signifié à personne ou, à défaut, suivant la première mesure d’exécution. (CPC, art. 1416)
Si le débiteur forme opposition, le tribunal ayant rendu l’ordonnance convoquera les parties à une audience afin qu’il soit statué sur la demande du créancier au regard des contestations développées par le débiteur. (CPC, art. 1418)
Le jugement du tribunal se substituera à l’ordonnance portant injonction de payer.
d) Obtention de la formule exécutoire
Si aucune opposition n’est formée par le débiteur dans le délai imparti, le créancier peut demander au greffe dans un délai d’un mois à compter de l’expiration du délai d’opposition (ou du désistement de l’opposition), soit par déclaration, soit par lettre simple, l’apposition sur l’ordonnance de la formule exécutoire et l’ordonnance devient exécutoire de plein droit avec autorité de la chose jugée ;
e) Signification de l’ordonnance exécutoire
L’ordonnance déclarée exécutoire doit être signifiée au débiteur et pourra permettre des voies d’exécution pour le recouvrement des sommes dues.
Le seul recours contre cette ordonnance, si la première ordonnance a été signifiée à personne, est le pourvoi en cassation par le débiteur.
L’ordonnance peut être exécutée à compter de la délivrance de l’exécutoire sachant, qu’en cas de signification faite à domicile et d’opposition ultérieure, l’exécution sera suspendue dans l’attente d’un jugement statuant sur l’opposition.
« L’opposition régulièrement formée, à la suite d’une mesure d’exécution, contre une ordonnance portant injonction de payer rendue exécutoire, a pour effet de saisir le tribunal de la demande du créancier et de l’ensemble du litige, et affecte ainsi la force exécutoire du titre sur le fondement duquel la mesure d’exécution a été pratiquée; elle empêche dès lors la poursuite de la procédure d’exécution sans remettre en cause les effets de l’acte de saisie dont la validité s’apprécie au moment où il a été signifié; en conséquence, l’opposition ne peut pas conduire à ordonner la mainlevée de la saisie-attribution pratiquée, mais fait obstacle, jusqu’à ce qu’il ait été statué sur l’opposition par la juridiction compétente, au paiement au créancier des sommes rendues indisponibles. » (Cass. avis, 8 mars 1996: Bull. civ. no 4)
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